Où vont les architectes paysagistes ? Du paysagisme jardiniste au paysagisme de médiation

L’architecture du paysage est aujourd’hui un domaine professionnel et une discipline en crise. Ce qui veut dire qu’elle aborde une nouvelle étape de son développement, et non qu’elle est menacée de disparition.

Comme il est acquis par les scientifiques que la notion de paysage n’appartient à personne, chacun, depuis sa discipline, s’en empare et théorise avec plus ou moins de rigueur et de vigueur. Dans le foisonnement actuel des publications et des manifestes de toutes natures, il est bien difficile de savoir qui croire. Et, en dépit des définitions claires de la Convention européenne du paysage de Florence de 2000, les enjeux vus par les praticiens comme par les théoriciens restent opaques, car chacun est libre de croire qui il veut et cela quelle que soit la rigueur des raisonnements avancés.

L’architecture du paysage est en crise, car elle aborde une nouvelle mutation professionnelle depuis que les notions de jardins et de paysage existent. Les symptômes en sont les suivants :

  • abandon progressif depuis 20 ans des modèles canoniques (le jardin paysager, le système urbain de parcs publics) et fin des styles académiques de jardin,
  • apparition de nouvelles pratiques de landscape design (Nicolin et Respithi, 2003 ; Mosser et Brunon, 2006)
    • Réinvention du parc public (notamment par B. Tschumi, J. Corner, M. Corajoud, G. Vexlard, P. Latz, B. Lassus, G. Clément) en relation avec la cessation des activités industrielles, portuaires et aéroportuaires dans les régions urbaines,
    • Renouveau des pratiques jardinières (jardins familiaux, jardins partagés) et retour à une esthétique et à une éthique du jardin ( G. Clément),
    • Déplacement du rôle des paysagistes des centres urbains vers les régions périurbaines (agriurbanisme, corridors écologiques, réhabilitation des espaces industriels),
    • Développement d’une sensibilité patrimoniale relative aux jardins et aux sites (charte de Florence de 1981, et actions de conservation de l’UNESCO/ICOMOS),
    • Injonctions de la Convention européenne du paysage de Florence de 2000,
  • Développement, réforme et diversification des formations de paysagistes (conséquence de la Convention du paysage de Florence et de la réforme européenne universitaire de Bologne de 1999),
  • Explosion des éditions de textes théoriques et professionnels sur le paysage et le jardin (diffusion de nouvelles théorisations du paysage, du jardinisme, de l’urbanisme et de l’architecture : A. Roger, A. Berque, J.P. Le Dantec, B. Lassus, G. Clément, J.D. Hunt, J. Corner, C. Waldheim, D. Cosgrove, R. Koolhas, etc. ).

En retraçant l’histoire rapide des paysagistes. je voudrais montrer que la situation actuelle résulte de l’apport de nouvelles compétences et idées qui sont apparues chronologiquement dans l’ordre suivant :

1.       l’art des jardins (depuis l’Antiquité),

2.       l’architecture (depuis la Renaissance),

3.       la peinture de paysage (depuis le XVe siècle)

4.       L’horticulture ornementale (depuis le début du XIXe siècle ),

5.       l’urbanisme (depuis le milieu du XIXe siècle),

6.       la géographie sociale et culturelle, et l’écologie du paysage  (après la seconde guerre mondiale).

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Pierre Donadieu: Professeur, ENSP de Versailles-Marseille.

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